J’avais en mémoire de ce magnifique film d’Yves Allégret la fameuse et terrible scène de danse qui m’avait hanté par la désolation du regard porté sur les désespoirs. L’histoire est dans notre conscience collective, et pourtant, je ne me souvenais pas de tout, sauf du plus marquant.
Un couple de français s’arrête à Alvarado, un petit village perdu sur la côte dans la région de Veracruz au Mexique, sous une épouvantable chaleur torride, en pleine fête des morts, si particulière. Le mari, malade ne peut aller plus loin, et finalement meurt très vite d'une méningite cérébro-spinale. Très vite, la ville contaminée par la maladie très contagieuse et mortelle, est mise sous quarantaine. La femme, Nellie rencontre Georges, un médecin déchu et alcoolique au dernier degré, et éprouvent des sentiments l’un pour l’autre dans une situation de terrible pandémie, qui vont être difficiles entre leurs désespoirs, leurs souffrances et leurs fiertés mal placées. Pourtant, la puissance de l’amour semblerait être un moteur plein de ressources.
La réalisation est superbe, sur une mise en scène magnifique aux cadrages particuliers qui donnent encore plus cette impression d’étouffement, tant par la chaleur que par les sentiments qui ne cherchent qu’à éclore et s’exprimer. Les dialogues sont mesurés mais percutants. Le « striptease » est d’un raffinement et d’une élégance érotique, de par sa douce lenteur et son innocence troublante. Enfin, la terrible danse sauvage pour une bouteille est doublée d’humiliation qu’elle se produit sous les yeux de l’amour. La musique tenace qui ne nous lâche pas, martèle la chaleur, la mort, la fête qui prend une dimension décalée et symbolique avec les enfants qui ramassent les bonbons tombés des toro del fuego.
J’ai adoré l’ambiance, et les protagonistes bien marqués et attachants. Je regrette, tout comme le réalisateur qui s’est vu imposé une fin autre que celle prévue, qui sombre dans un happy end hollywoodien ridicule, et va à l’encontre de la trame, quand celle prévu à l’origine était beaucoup plus subtile. Sympa l’entretien dans les bonus du dvd en date de 1972, avec le réalisateur et l’actrice phare, qui relatent les dessous du film, les conditions météos terribles, leurs impressions et des anecdotes passionnantes de réalisation.
Le beau Gérard Philipe est divin d’expression de douleur désinvolte et de sentiments exacerbées qu’il en hante longtemps. La très belle et énigmatique Michèle Morgan, est sublime par ses gestes tout de retenus et ses regards envoutants. Michèle Cordoue, femme du réalisateur, toute belle est excellente de jalousie mordante et d’une sacrée force de caractère. Carlos López Moctezuma comme Victor Manuel Mendoza, André Toffel et Arturo Soto Rangel ou encore Chel López, Josefina Escobedo et Lucrecia Muñoz donnent de tout leur talent pour contribuer avec succès à l’ambiance de cette belle histoire.