Le cinéma de Diane Kurys est de ceux qui marquent les esprits et nous hantent longtemps. Par ses histoires d’enfance et de famille, par son style et sa démarche, par ses ambiances et ses interprètes, mais aussi avec sa sincérité qui émeut toujours. Avec Diabolo menthe, elle nous contait une adolescence avec sa sœur ainée et leur père divorcé, craint et aimé. Cocktail Molotov abordait Mai 68 et l’éveil à l’amour, la sexualité, au passage à la vie adulte. Avec Coup de foudre, nous revenions sur ses parents, leur rencontre, l’héroïsme du père et l’amour de sa mère pour une femme qui deviendra celle de sa vie. La Baule-les-Pins revenait à l’enfance juste avant le divorce, avec la tension lourde qui plombe un été à la plage. Dans toute son œuvre, une obsession, la séparation des parents l’ayant marqué à vie, revient telle une ritournelle insane. A chaque étape, des secrets de famille se révèlent. Des amours se font et se détruisent, des tâtonnements et des révélations exploses, toujours feutrés et dans l’émotion et la tendresse.
C’est encore le cas dans ce très beau film, qui reprend les différentes épreuves évoquées dans ses films précédents, à l’heure du décès de la mère. De nouvelles découvertes, de nouveaux secrets semblent s’exhumer d’une valise pleine de souvenirs, de papiers et de photos. Ainsi, d’un traumatisme insidieux de la rupture, sans haine ni violence qui a tant hanté Diane, ce ne serait pas le divorce de ses parents, ni la relation particulière avec sa sœur, mais autre chose de non dit, et qui semblerait si évident au regard d’une photo de sa mère et de son oncle. Se pourraient-il qu’ils se soient aimé ? et que Diane soit la fille de cet homme ? quant un simple test ADN lui révélerait aisément. Elle nous raconte sans preuve, avec force extrapolation hasardeuse, une histoire d’amour sourde et passionnément désespérée, dans une époque d’après guerre. La narration entre le présent à la mort de la mère et celle proche du père, et le passé violemment vivant, est réalisé avec beaucoup de pudeur, de tendresse et de justesse. Tout est en nuance, entre l’amour éperdu du père pour une femme qui l’aime juste par reconnaissance. Elle en est coincée dans les convenances, pas encore prête à partir, et désolée pour son mari, tant elle est enfin sûre d’aimer un autre. C’est assez cruel, glauque aussi entre deux frères, mais tel quel inéluctablement bien amené. Je me suis laissé emporter par l’ambiance de ce drame, mais aussi d’une époque, avec ce décalage des militants communistes aveuglés par la propagande du parti sur les exactions d’un régime de dictature prolétarienne. La reconstitution est superbe tant dans les coupes de cheveux, de la mode qui nous plonge dans les années 47 avec réalisme. C’est le temps du premier droit de vote des femmes, de la mentalité machiste, et des horreurs des camps dans les esprits. La réalisation est belle, et une fois de plus, DK a su s’entourer d’un très beau casting qui fonctionne à merveille.
Ainsi Benoît Magimel (Sans laisser de trace) est excellent, face à une Mélanie Thierry (Pardonnez-moi) qui est superbement belle et émouvante, passionnée et terriblement vraie. Nicolas Duvauchelle (Comme des frères) fait preuve de talent. J’ai toujours beaucoup aimé Sylvie Testud (Max) qui dégage ce sentiment de subtilité envoutant. Julie Ferrier (La vie domestique) est très bien dans un rôle de grande sœur maternelle, De même que je trouve Clotilde Hesme (Angèle et Tony) excellente, drôle et bouillonnante de vie. Denis Podalydès (Du vent dans mes mollet) este excellent, de même que Clément Sibony (L’oiseau), Et la gamine jouée avec talent par Ondine et Vera Barry.