Très belle découverte encore au pied de mon sapin de Noël avec ce ce sublime chef d’œuvre. Comédie champêtre de Keisuke Kinoshita qui n’est pas si légère qu’elle en a l’air. Il y a un peu de l’esprit avec Jour de fête de Jacques Tati dans une moindre mesure. Ce film a une particularité très importante, celle d’être le premier film japonais en couleur en Fujicolor.
L’histoire, apparemment simple, nous narre la venue d’Aoyamade de son nom pseudo Lily Carmen et de son amie Maya Akemi, à la campagne pour voir son père et sa sœur le temps d’un week end, et la fête au village. Précédée de leur réputation d'artistes, les jeunes femmes arrivent avec des vêtements colorés modernes, et une aisance de libre fierté de mouvement et de vie, qui laisse admiratif certains villageois et en choquent d’autres. Le choc des cultures entre Japon traditionnel et moderne de ce début des années cinquante se confronte diversement. Rapidement, elles sentent que leur entrée dans le cercle du village ne se fait pas sans résistance, avant finalement d’en être rejetées. Leur comportement, leur liberté de femmes émancipées et leur profession de stripteaseuses leur ferme toutes les portes, même celle du père. Dans une dernière bravade, avant de rentrer à Tokyo, elles montent leur spectacle qui fera salle comble, et offriront la recette au père. L’hypocrisie de chacun, se révèle dans l’afflux à les voir sur scène, et accepter l’argent.
J’ai beaucoup aimé ce film, d’une beauté naturaliste, par sa couleur, par sa mise en scène relativement neutre, qui décrit une société en pleine mutation. Les images sont magnifiques, tant en cardages rapprochés, tantôt éloignés pour mieux nous montrer tant les situations proches et parfois amicales, ou l’éloignement des deux mondes. J’ai adoré le spectacle de danse et les regards des spectateurs face à celui des filles qui en dit très long. Dans les bonus, un étrange entretien avec le réalisateur en 1982, donne une impression étonnante. Répondant à la question sur le type de femme que Keisuke Kinoshita aime, il nous décrit avec admiration, non celle de la femme émancipé mais la femme traditionnelle, épouse soumise au mari et aux enfants, restant sagement à ma maison. J’ignore s’il s’agit d’un humour au second degré, et dans le cas contraire m’interpelle sur le sens à donner de cette histoire.
La très jolie Hideko Takamine (Les soeurs Munakata), la "Shirley Temple japonaise", est magnifique d’émotion, de futilité et de blessures qu’elle retranscrit avec talent, de même que la belle Toshiko Kobayashi (Contes cruels de la jeunesse), émouvante et gracile. Chishu Ryu (Voyage à Tokyo) est excellent, comme Shuji Sano et Kuniko Ikawa. Les Takeshi Sakamoto et Bontarô Miyake, Keiji Sada ou Koji Mitsui (La forteresse cachée) tout comme Yuko Mochizuki (Kwaidan) sont à tous égards marquants.