Très beau et terrible film de Christine Carrière sur un sujet aussi grave et sensible que la violence conjugale. Adaptation du roman de Jean Teulé, qui n’en reste pas moins tiré d’une histoire vraie, qui puis est aussi hélas le reflet de la réalité de millions de femmes. Conseillé lors d’une conversation par Marie, je me suis laissé emporter par le récit, dont au début on ne sait trop quelle est la part de la comédie comique, avant progressivement entrer dans l’horreur d’un quotidien infernal dont le pire est toujours à venir. Ce qui semble drôle, c’est la pudeur de dire sans fard la monstruosité de ce qui est prit comme une fatalité inexorable. Quand en fait, il s’agit d’un engrenage de la vie qui ne trouve de salut et d’échappatoire tellement l’atrocité de que chaque jour est un enfermement dans l’absurdité sans porte de sortie. Le film est remarquable de part la description subtile et intelligente de ce que vivent toutes ces femmes humiliées, violentées, battues souvent jusqu’à la mort, sans que l’on ne comprenne pas pourquoi elle ne se débarrasse pas au plus vite d’une situation inextricable. C’est que justement, le piège est dans le refus de se croire prisonnier dans une psychologie aveuglée par des peurs multiples qui retiennent ces victimes.
Sur le même thème, nombre de films m’ont renversé de colère, mais celui-ci m’a particulièrement bouleversé. Par le ton donné d’une narration qui masque les incohérences avec un humour noir second degré violemment mordant. Le pire est encore à la toute fin, quand on apprend qu’elle n’avait toujours pas retrouvé la garde de ses enfants. J’ose espérer que depuis la sortie du film, ça s’est arrangé… La réalisation est particulièrement soignée, suppléée par une interprétation extraordinaire de la part surtout des deux actrices principales.
Ainsi, j’ai rarement vu Marina Foïs (Boule et Bill) être bouleversante à ce point d’émotion aussi violente qu’elle en hante longtemps. Dans le même temps, je n’ai pas trouvé Guillaume Canet (Jappeloup) suffisamment à la hauteur d’un rôle aussi pernicieux. Sans doute qu’il a eu du mal à s’intégrer dans un tel monstre, ou moi qui est eu du mal à l’accepter aussi ignoble ? La jeune Océane Decaudain est terrible de naturel qui nous prend aux tripes, tellement son interprétation est parfaite, au point de se demander pourquoi on ne la voit pas plus. Comme toujours, Anne Benoit (Louise Wimmer) est excellente, tout comme Marc Brunet, de même que Sissi Duparc (La cage dorée). Courte mais marquante apparition de Guillaume Gouix (Attila Marcel).