Brian Percival s’est attelé à l’adaptation du roman de Markus Zusak, auteur australien d’origine allemande qui avait intégré des souvenirs de famille dans cette terrible histoire.
Relatant une période de 1939 à 1943 dans une petite ville de Bavière, à quelques kilomètres d’un camp d’extermination, l’histoire nous est racontée avec un humour cynique par la mort elle-même. La trame possède un intérêt primordial, celui de montrer le quotidien de la population allemande, avec un regard autre que celui des films de guerre manichéens sans nuance auxquels nous avons droit la nuit des temps.
Au travers de la vie d’une gamine placée en famille d’accueil par sa mère communiste et recherchée par les nazis, c’est le cœur lourd qu’elle intègre cette maison chez des inconnus alors que son petit frère vient de mourir. Analphabète, elle va finir par trouver refuge dans les livres volés, en tout premier lieu avec celui que son petit frère tenait encore sur lui en mourant. Chipant à droite, à gauche les livres à sa portée, jusque dans les cendres fumantes d’autodafé nazi, elle développe ses sens et son regard autour d’elle. Les parents d’accueil, l’homme charmant et sa femme d’apparence rude, qui hébergeront un fugitif juif. Un petit camarade adorable qui devient rapidement son meilleur ami, et les habitants de la ville, vivant dans la peur des chemises brunes, de la guerre et bientôt des bombardements. Et la mort n’est jamais bien loin pour frapper quand on ne s’y attend pas.
Bien sûr, c’est un peu doucereux, mais sans jamais sombrer dans le pathos, et où finalement tous sont plus ou moins assez bien gentils, malgré le nazisme ambiant. Il a aussi le mérite de nous plonger au cœur de la vie quotidienne en Allemagne sous la coupe de la dictature. Une manière de rappeler que les allemands n’étaient tous des nazis, comme tous les français n’étaient pas tous des résistants. La réalisation est belle, avec une reconstitution d’époque qui semble bien réelle, sur une ambiance bien lourde où le danger guette de toute part, même de ses amis ou de ses proches. La politique des alliés avec ses bombardements sur les populations civiles, qui n’ont rien à envier aux nazis et relèvent tout autant de crime contre l’humanité, émeut face aux ravages. D’autant qu'aucune bombe n’a jamais détruit la moindre voie de chemin de fer vers les camps de la mort. Ce film ne laisse donc pas indifférent par le ton, les images et le jeu des interprètes.
De fait, la petite Sophie Nélisse (Monsieur Lazhar) est excellente de conviction et d’émotion qui marque durablement. De même Geoffrey Rush (The warrior's way) est superbe de douceur et d’humanité, et la savoureuse Emily Watson (Anna Karenine) très émouvante. Le gamin Nico Liersch est adorable. Ben Schnetzer, Kirsten Block ou Heike Makatsch comme tant d’autres, donnent une belle crédibilité à l’ensemble.