Par bobmorane75
Cinquième réalisation de Mathieu Amalric (Tournée), qui adapte ici un roman policier de George Simenon, avec beaucoup de subtilité et d’intensité amoureuse cauchemardesque.
Le récit tient en quelques lignes avec l’arrestation d’un homme soupçonné du meurtre par empoisonnement de sa femme et de sa fille et qui narre sa vie mouvementée de ces derniers mois avec sa passion amoureuse pour une ancienne camarade de classe. Celle-ci pharmacienne est également en détention pour le meurtre supposé de son mari. Tout converge sur la culpabilité des amants terribles quand aucune preuve n’est apportée, quand la vérité est masquée par cet amour adultérin qui brouille toutes les conventions et délaissent bien d'autres pistes.
Passé la première scène crue, afin de montrer si besoin était la passion amoureuse quelque peu surfaite en l’occasion, s’en suit un drame d’une profonde poésie dramatique extrêmement touchante. Dans une ambiance brumeuse et vaporeuse, se dévoile une passion amoureuse dévorante entre des amants éperdument amoureux depuis leur tendre jeunesse sans avoir jamais osé se l’avouer, et qui se sont retrouver par hasard pour leur plus grand bonheur, et le plus terrible malheur. La mise en scène est d’une parfaite maitrise, les images sublimes et le suspens insoutenable. Nous sentons dès le début que la culpabilité n’est pas là, nous savons qu’un amour aussi ténu n’a pas besoin de la mort dont la logique émotionnelle et la pureté des sentiments, malgré la trahison de l’adultère, n’est pas de mise à des assassinats. Et terrible le sourire et le regard vainqueur coupable de l’assassin quand on s’y attend le moins.
J’ai été envouté par l’ambiance, sur une époque qui se situe de nos jours, quelque peu désuet tant il reflète une mentalité de province des années cinquante à plein nez, et dont le décalage accentue encore cette impression d’étouffement. Le style de narration sent bien la pate de l’écrivain au style si particulier, dont j’adore les livres autres que les Maigret. La douceur des images en apparence calme pour évoquer un amour discret et magnifiquement désespéré contraste avec les sentiments exacerbés. J’ai été longtemps hanté par le fatalisme des amoureux, acceptant sans combattre la sanction d’avoir trop aimé en un interdit social qui réprouve avec hypocrisie leur bonheur.
Le ton du jeu, et de la voix de Mathieu Amalric (The grand Budapest hotel) qui porte tout le poids de ce drame, est superbement impressionnant, de même que sa compagne à la ville, Stéphanie Cléau. j’adore Léa Drucker (Le grand méchant loup) qui dégage là encore des forces d’émotion, des passions refoulés, une énergie canalisée pour marquer de ses regards, de son sourire de sa sonorité, tant de conviction impressionnante. Laurent Poitrenaux (La vie domestique) et Serge Bozon, comme Christelle Pichon et Véronique Alain, Paul Kramer et la jeune Mona Jaffart, apportent les éléments de la réussite de l’œuvre.
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