Huis-clos théâtral sombre et étouffant pour cette quinzième réadaptation portée au cinéma et tentée par Liv Ullmann d’après la pièce d’August Strindberg, sans compter les téléfilms, et bien sûr au théâtre, qui fit tant scandale en son temps, pour n'être plus qu'un classique sans saveur désormais, surtout dans cette réalisation.
Miss Julie est jeune comtesse qui est convoitée par l’arriviste John, le valet sans scrupule. Un soir de la Saint Jean bien alcoolisée, il abuse d’elle plus qu’elle ne se laisse séduire, quasiment sous les yeux de sa fiancée, la bonne Kathleen. Acte fini, John révèle son vrai visage à la jeune désespérée qui comprend que son avenir est brisé. S’engage un débat conflictuel sur leur devenir qui prend une tournure sombre au fur et à mesure que le jour revient, ainsi que le comte.
Si l’on comprend qu’à sa sortie, la pièce eut déclenchée des passions extrêmes, jusqu’à la censure durant des années, tant heurté les bonnes âmes qu’une riche et noble se perde avec un va nu pied, aux conséquences terribles, il n’y a plus lieu de l’être de nos jours. Ainsi, d’avoir refait cette tragique histoire en ne le déplaçant de Suède en Irlande n’apporte rien de nouveau en soit. De même le théâtre au cinéma, une fois de plus, s’avère épouvantablement indigeste, quand bien même la mise en scène serait maitrisée et les interprètes excellents. Car le thème en lui-même, tel quel, est cruellement vieilli en l’état. Tant qu’à faire autant refaire intelligemment en reprenant une autre époque, un autre cadre dans des circonstances développées autrement qui amèneraient à un débat sur des thèmes similaires et plus actuel.
J’ai eu le sentiment que la réalisatrice s’est fait plaisir avec ce classique sans arriver à le transmettre. J’ai eu beaucoup de mal à entrer dans le jeu de scène, et dans l’histoire qui n’a pas soulevé chez moi de grande émotion, pas même dans cette fin tragique. La faute sans doute à une rigueur théâtrale dans la mise en scène et les cadrages, et dans un jeu ou le décalage est criant entre celui de Jessica qui maitrise parfaitement la scène, et Colin à qui il manque indéniablement ce quelque chose qui fait la différence. Ça se laisse suivre, sans passion mais aussi sans indifférence.
Jessica Chastain (Zero dark thirty) donc, dégage un extraordinaire talent qui marque longtemps, face à Colin Farrell (Ondine) trop en deçà de sa partenaire pour impressionner, de même vis-à-vis de Samantha Morton (Cosmopolis) très au fait de son jeu. La jeune Nora McMenamy est très émouvante.