Pour son premier long métrage, Ryan Gosling nous entraine dans les bas fonds d’une société en perdition, entre glauque et sordide dans une ambiance surréaliste qui met franchement mal à l’aise, pour un conte fantastique assez zarbi et qui pourtant est envoutant et marquant, voir quelque peu hantant.
Perdue dans une ville désagrégée par la crise économique vidée de ses habitants, Billy, une jeune mère célibataire avec deux enfants, n’arrive plus à joindre les deux bouts pour conserver désespérément sa maison familiale aux traites impossibles à rembourser. Elle se voit proposer un emploi dans un spectacle d’un genre spécial glauque, pour un public amateur de sensations fortes. Cependant que son fils ainé Bones, tente de récupérer le cuivre dans les maisons désaffectées qui le mette en danger face à un petit malfrat local, il découvre une route qui mène vers une ville engloutie. Sa jolie voisine Rat et sa grand-mère se trouvent en danger par le loubard pour leurs liens avec Bones.
J’avoue que j’ai été un peu perdu dans ce no mans land d’une ville désagrégée par la crise, vidée de sa population, dans une sorte de monde post apocalyptique où tentent de survivent des résidents éparses qui s’accrochent à leur peu de bien qui leur reste. La vision effrayante des stigmates de la crise dans la ville de Detroit est stupéfiante d’irréalité fantasmagorique qui m’a envouté autant que hanté. C’est superbement angoissant. Et puis ce spectacle étonnant qui donne une ambiance encore plus ambigüe et glauque dans cette atmosphère délétère. De fait, il reste une impression forte qui ne m’a pas déplu sans m’enthousiasmer, mais dont j’ai aimé l’originalité de l’ensemble, dont on sent des influences de réalisateurs avec lesquels Ryan a tourné, en attendant sa propre pate personnelle qu’il imprime cependant dans sa première œuvre.
Car de talent, il y en a à revendre dans cette première réalisation qui ne laisse pas indifférent avec cette sorditude impressionnante. La photo est magnifique aux couleurs et lumières particulièrement envoutantes. La mise en scène est maitrisée, au jeu de caméra troublant tel un regard malaisé et des vues tantôt de très près presque gênantes, comme de loin tout aussi angoissant sur les ruines d’une ville gigantesque. Enfin, j’ai adoré ce lac mystérieux aux lampadaires magiques qui s’allument majestueusement au dessus des flots.
Un beau casting, avec une Christina Hendricks (Ginger & Rosa) belle et lumineuse, avec Iain de Caestecker (Not another happy ending) convaincant et Saoirse Ronan (The grand Budapest hotel) toujours aussi marquante. Matt Smith (Womb) et la belle Eva Mendes (The place beyond the pines), Ben Mendelsohn (Exodus: gods and kings) et l’excellente Barbara Steele (Le monocle rit jaune), ainsi que Reda Kateb (Hippocrate) et le petit Landyn Stewart, comme Torrey Wigfield, sont tous dans le ton de l’ambiance avec conviction.