Film troublant de Simon Curtis dont l’insipidité My week with Marilyn mettait déjà en garde, sur une histoire réelle racontée avec un certain esprit et une tonalité dérangeante qui laisse perplexe plus que rêveur et malaisée tant sur la forme que sur le fond, entre réparation historique et avidité pécuniaire.
Un jeune avocat de Los Angeles dans le besoin, est recommandé auprès de Maria Altmann, pour une histoire d’héritage. Cette mercière septuagénaire souhaite récupérer un tableau de Gustav Klimt, pour lequel sa tante Adele Bloch-Bauer avait posée. Durant la guerre, les nazis les avaient spoliés avant de les déporter en camp de la mort. Ce célèbre tableau, officiellement propriété de l’Etat autrichien par un don testamentaire, était exposé au musée du Belvédère. Refusant de s’en occuper dans un premier temps, l’avocat change d’avis quand il prend conscience de la valeur marchande d’une telle toile. Il intente un procès contre le gouvernement autrichien.
Si le récit d’une aussi terrible histoire est émouvant sur la folie meurtrière antisémite des nazis, et le pillage systématique de leurs biens, la narration interpelle à plus d’un titre qui met mal à l’aise. J’avoue que la tonalité m’a quelque peu interloqué avec cet espèce d’humour beaucoup trop british pour une austro-américaine israélite, donnant une impression de pastiche limite antisémite assez dérangeant. De même, plus que dans le désir de réparation historique et de condamnation de l’horreur nazie, la vénalité de l’avocat avec autant d'exergue, alors lui-même enfant survivant de la solution finale, donne une impression déplaisante, quand bien même cela réfléterait la réalité. Le tableau sera revendu à Ester Lauder pour 138 millions de dollars…
Dans ce contexte, j’ai peu gouté la réalisation, à la mise en scène confuse et terne, axant ses effets de blaguounettes et bons mots qui tombent le plus souvent à côté de la plaque, tant par rapport aux situations dramatiques, que par la tonalité tellement britannique. Dommage, car il y avait là, au-delà de ce récit, celui des millions d’autres victimes des spoliations et du génocide, de quoi révéler la machinerie bien huilée de certains nazis pour s’approprié les arts « décadents » et s’enrichir à bon compte. Certes, les alliés se sont largement servis ensuite pour des collections privées ou des grands musées. Le tableau en question, avait été peint en 1912 à Vienne par le célèbre Gustav Klimt, suite à une commande de cinq tableaux par Ferdinand Bloch-Bauer, riche industriel devenu un mécène d’artistes. Adele Bloch-Bauer, décédée comme la quasi totalité en camp, est le seul modèle que le peintre avait peint à deux reprises. Un documentaire, L’affaire Klimt -Stealing Klimt- de Jane Chablani et Martin Smith retrace les cinquante ans de combat pour sa restitution.
Avec un choix d’interprètes détonants, quand bien même ils seraient de qualité, avec Helen Mirren (Les recettes du bonheur) qui nous la fait trop reine d’Angleterre est assez agaçante, et un Ryan Reynolds (Captives) particulièrement peu inspiré. Daniel Brühl (Un homme très recherché) et Katie Holmes (Wonder boys) s’en sortiraient au mieux, de même qu’un Max Irons (Les âmes vagabondes). Les Charles Dance (Dracula untold) et les belles Tatiana Maslany (Je te promets - The vow), comme Antje Traue (Man of steel) et Elizabeth McGovern (Le choc des titans), femme du réalisateur, ou encore Jonathan Pryce (G.I. Joe : conspiration), Tom Schilling (Suite française) et Moritz Bleibtreu (Le cinquième pouvoir), sont dans l’ambiance.