Encore une superbe réalisation de Paolo Sorrentino un peu dans la veine de son La grande Bellezza, avec sans doute moins de grandiloquence fêtive et de paillettes étincellantes, mais avec beaucoup plus d’acuité et de profonde pertinente introspection sur la jeunesse perdue, sur la vieillesse, l’amour et l’amitié, sans jamais sombrer dans la tristesse ou la morale, mais en gardant une fraicheur lumineuse avec beaucoup de recul serein.
Deux octogénaires, amis de très longue date, Fred Ballinger et Mick Boyle, profitent de leurs vacances dans un bel hôtel somptueux à la montagne. L’un, compositeur et chef d’orchestre renommé et retiré, l’autre, réalisateur toujours en activité qui travaille d’arrache pied sur le scénario de son prochain film. Face à la vieillesse et la maladie, ils s’adonnent à la réflexion et relatent pensées et souvenirs d’antan. Pourtant, autour d’eux s’activent Lena, la fille de Fred, dont le fils de Mick demande le divorce, les scénaristes de Mick en pleine création, un jeune acteur en remise en cause existentiel, une miss monde en recherche de rôle et d’autres riches clients de tous âges.
Dans une ambiance éthérée, comme hors du monde dans une sorte de huis clos, les protagonistes s’évertuent à entretenir les mêmes rengaines qui les lient dans une complicité immémoriale entre cynisme et regard désabusé de leur vie. J’ai été captivé et envouté par ce récit, qui jamais ne sombre cependant dans un désespoir de fin de vie, bien au contraire. Faisant le bilan de leur vie longue et mouvementée, ils n’en restent pas moins lucides, drôle, émouvants et attachants. Dans un paysage pourtant magnifique, une certaine angoisse fraiche illustre les esprits troublés des personnages. Une dualité stérile presque sénile oppose les deux compères dans leur présente situation, quand l’un à renoncer à sa passion, et l’autre s’y accroche désespérément.
La réalisation est superbe, pour une mise en scène fluide avec des originalités marquantes et un sens du dialogue remarquable. L'hôtel est véritablement un personnage à lui seul. Le final, avec toutes les actrices ayant jouées pour le réalisateur est magnifique. Sur un rythme langoureux, jamais on ne ressent de lenteur ni de longueur tant, telle une partition, chaque scène comme les dialogues sonnent juste la mélodie de la vie qui passe. Lumières et couleurs, travelings et plans rapprochés, éclairent les participants avec un regard sans concession qui nous prenne avec surprise et enchantement.
Michael Caine (C'est la faute à Rio) et Harvey Keitel (The grand Budapest hotel) sont excellents, ainsi que la belle Rachel Weisz (Le monde fantastique d'Oz) terriblement marquante, de même Paul Dano (Love & Mercy) qui donne un nouvel aperçu de son talent imposant. Jane Fonda (Le majordome) est toujours aussi enthousiaste. Alex MacQueen (Cendrillon) et la jolie Luna Zimic Mijovic (Sarajevo, mon amour), ainsi que Tom Lipinski (Last days of summer) et Chloe Pirrie, Alex Beckett et Nate Dern, ou encore Mark Gessner et Paloma Faith (St Trinian's) animent avec succès avec Ed Stoppard et Sonia Gessner (La grande Bellezza), et la très belle Madalina Diana Ghenea, ainsi que la jeune Emilia Jones (Un jour).