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20 mai 2013 1 20 /05 /mai /2013 10:09

Excellent docu-fiction de Bahman Ghobadi, qui tranche avec Rhino season qui m’avait laissé dubitatif. Deux jeunes gens, un musicien et une chanteuse, au sortir de prison pour avoir organisé un concert, tentent de constituer un groupe de rock indé et quitter le pays. Prétexte superbe pour nous faire découvrir un autre visage du Téhéran de mollahs, celui de la riche variété de la musique sous toutes ses formes, et du désir du peuple iranien de chanter et danser formellement interdit. En effet, selon les préceptes de l'Islam, la musique (ghéna) est impure (haram) parce qu'elle provoque de la joie et de la gaîté. De la même manière, entendre le chant d'une femme est considéré comme un péché car cela crée des émotions, comme nous avions pu le voir dans cet excellent film syrien Passion de Mohamed Malas. De fait, des milliers de musiciens et chanteurs, répètent, enregistrent, vendent leurs disques et donnent des concerts en totale clandestinité. Tous les moyens sont bons, en sous sol, sur les toits, dans des fermes… au prix de prisons, amandes, coups de fouets et parfois assassinats. Filmé à la va vite, notre jeune couple parcours la ville en tout sens, nous faisant découvrir un visage du pays, passionné et varié aux multiples contrevenances islamiques, dans un foisonnement de vies. Ainsi, du haut des immeubles, dans l’obscurité des caves, en voiture, moto, métro, nous parcourons la ville à la découverte d’artistes de talents, aussi bien en chants et danses persan, du classique au rap en passant par toutes les formes de rock. L’ingéniosité des ces passionnés, pour acheter des instruments, pour répéter et se produire fait montre du talent et de l’obstination d’un peuple. L’occasion aussi de rencontrer ou d’apercevoir toutes les fanges de la société iranienne. Les riches dans leurs palais comme les pauvres dormant à la belle étoile dans les ordures, les commerçants en tous genres, la beauté des femmes, l’architecture de la ville avec une bande musicale qui donne le tournis de la richesse et de la beauté sonore. La réalisation est magnifique, et montre la peur et l’angoisse à chaque instant pour tous et l’envie constant de défier l’interdit. Ainsi cette scène stupéfiante, où la police arrête la voiture du couple, sans que l’on puisse deviner le délit dont ils se seraient rendus coupable malgré toute leur prudence. Les pasdarans en colère ont en effet aperçu que le jeune homme tenait un petit chien entre les mains. Grave délit islamique qui peut couter cher. En effet, en Iran, il est formellement interdit de sortir avec un chat ou un chien. J’ai adoré ce film par son style vif, par ses couleurs, par sa lumière et par l’espoir que suscite cette résistance tenace à faire vivre la musique et le cinéma en dépit de tous les risques encourus. L’Iran est un magnifique pays aux gens extraordinaires, et je préviens de suite que le jour où la démocratie reviendra, car aucune dictature ne dure, il faudra compter sur la richesse créatrice de tout ce peuple qui impose déjà régulièrement ses talents, et pèsera lourd sur la scène internationale.

Mise à part l’excellente Negar Shaghaghi, Ashkan Koshanejad, et Hamed Behdad qui sont des comédiens de talent, tous les autres participants sont de vrais artistes aux multiples passions, dont chants, musiques et danses m’ont envoutés.

3 étoiles

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